Déconnecter pour reconnecter, ou comment faire une pause enrichissante
Il n’est certainement pas rare de voir les élèves et le personnel enseignant qui sortent le mobile pour parcourir leurs réseaux sociaux lors de la pause entre deux classes, à la cour de récréation, où à l’heure du déjeuner. Si vous n’êtes pas dans la salle des professeurs à l’heure du déjeuner, il est fort probable que vous êtes dans votre salle de classe, en train de répondre aux courriels ou en essayant de cocher les éléments dans la longue liste de tâches à accomplir. Ainsi, nous rentrons tous dans la salle de classe un peu plus fatigués, un peu plus irrités, et aucunement plus revigorés qu’avant le début de la pause! Force est de constater que la notion de ‘faire pause’ a évolué, et pas nécessairement pour le mieux. Effectivement, il semble que nous ne soyons plus capables de donner à notre cerveau les pauses qu’il mérite au cours de la journée, et qui lui sont essentielles.
Je propose donc que nous prenions tous du recul vis-à-vis de nos appareils et nos besognes, et que nous fassions plutôt un pas vers l’extérieur. Pourquoi pas inviter un(e) collègue à vous accompagner, et encourager vos élèves à en faire de même. Il faut déconnecter avant de pouvoir reconnecter.
La technologie, ennemie du repos du cerveau
Nous sommes conscients du fait qu’une utilisation excessive de la technologie peut entraîner des facteurs psychologiques tels que le stress, l’anxiété et la dépression (Lee et al., 2014). Les études démontrent en effet que les appareils nous empêchent de bénéficier des effets positifs du repos (Atchley et al., 2012; Jiang et al., 2018). Le simple fait de mettre de côté vos appareils va non seulement aider vous et vos élèves à vous ressourcer, mais en même temps cette habitude ouvre la voie à des possibilités de se connecter socialement, en face à face.
Les maints avantages de prendre une pause revigorante à l’extérieur
Bien que cela puisse sembler paradoxal, le fait de prendre une pause, et mettre de côté le travail et les appareils, peut en fait faire augmenter la productivité.
Si vous délaissez temporairement la technologie et passez du temps à l’extérieur, vous bénéficierez non seulement sur le plan du bien-être général, mais également au niveau de la performance scolaire et le comportement. Du coup, la concentration est meilleure, et il y a moins d’accès de colère, tant chez les élèves que chez le personnel enseignant.
En plus, il y a un lien évident entre notre bien-être et la nature, comme le démontrent de nombreuses études :
- Une interaction avec les milieux naturels nous aide à nous remettre plus rapidement du stress, comparé aux milieux intérieurs/bâtis (Pearson & Craig, 2014);
- Les milieux naturels sont plus efficaces que ne le sont les milieux intérieurs/bâtis pour nous aider à surmonter l’épuisement mental (Hartig et al., 2003);
- L’espace extérieur favorise un sentiment de ‘déplacement’ similaire (à une plus petite échelle) à ce qu’on ressent quand on est en vacances (Kaplan, 1995);
- Quand nous nous sentons reposés sur le plan cognitif, nous sommes moins aptes à agir de façon impulsive; nous sommes plus gentils envers les autres, et nous sommes mieux équipés pour résoudre les problèmes (Berto, 2014);
- Même un contact relativement bref avec la nature suffit pour remonter le moral (Capaldi et al., 2015);
- 20 minutes en pleine nature est le ‘chiffre magique’ pour en profiter de manière optimale (Hunter et al., 2019);
Il n’y a pas de meilleur moment que le présent pour mettre les appareils de côté et sortir respirer de l’air frais. Nous savons que la dépendance à la technologie est un fléau (Jiang et al., 2018) et que le temps passé à l’extérieur diminue (Pearson & Craig, 2014), donc il faut passer à l’acte, et nous déconnecter afin de reconnecter. Soyons modèles de rôle à ce titre : faites la promotion d’activités sociales sur le terrain du jeu, invitez des collègues à quitter la salle de classe et tenir une réunion lors d’une promenade ensemble; ou fixez tout simplement des intervalles pour éteindre temporairement l’écran au quotidien.
Où en commencer?
Voici un défi de mille heures à l’extérieur 1000 Hours Outside Challenge que vous et votre école/communauté pourriez adapter à votre contexte particulier. Par exemple, opposez les enseignants aux élèves pour voir quel groupe saura noircir le plus grand nombre de cercles sur le modèle durant une période définie; ou bien, posez le modèle d’affiche dans un couloir achalandé et encouragez toute la communauté scolaire à noircir les cercles pour rendre compte des heures passées à l’extérieur. Créez vos propres règles et lignes directrices, comme par exemple le fait d’être actif plus le fait d’être à l’extérieur équivaut à deux cercles, ou si on passe du temps dehors avec des camarades (et sans les écrans), on peut noircir un cercle pour chaque personne; encouragez les interactions sociales en face à face.
Profil de l’auteure :
Shannon Kell enseigne l’éducation physique et la santé depuis une quinzaine d’années; elle a débuté comme enseignante dans une école secondaire à Regina, dans la Saskatchewan. Présentement, elle est enseignante aux facultés de santé et d’éducation physique à l’Université Mount Royal à Calgary. Le point de mire de la recherche de Shannon consiste à encourager les enseignants et les étudiants « à ne rien faire ». Tout le monde peut décider, n’importe où, de passer du temps seul, dans la nature ou sans technologie afin d’améliorer son bien-être et sa santé mentale.