Promouvoir la sensibilisation au cerveau par la sensibilisation au corps
Le cerveau est le centre de contrôle du corps. Il reçoit constamment des centaines de messages du monde autour de nous et dit (en millisecondes) à notre corps quoi faire et comment le faire. On a longtemps cru que cela résumait la relation cerveau-corps : un dialogue unilatéral où le cerveau dit au corps quoi faire. Par contre, nous savons maintenant que le corps a tout autant à voir avec ce que fait le cerveau. À titre d’exemple, avez-vous déjà essayé d’étudier ou de travailler après avoir consommé un hamburger, des frites, une boisson gazeuse et peut-être un morceau de gâteau pour dessert? Votre langue va certainement apprécier et votre corps peut avoir un regain d’énergie pendant la première demi-heure. Mais après? Vous ne vous enlignez certainement pas pour faire quelque chose qui exige de la concentration, à moins de vous concentrer sur la sieste.
Il est clair qu’il ne s’agit pas d’une relation à sens unique. L’état du corps et un impact direct sur l’état de l’esprit.
Lorsque vous êtes un étudiant, votre cerveau fait intégralement partie de votre réussite scolaire. Il vous aide à vous concentrer en classe, il vous aide à lire et à écrire, il vous aide à résoudre des problèmes et il vous aide à communiquer avec vos pairs. Mais saviez-vous que votre corps fait aussi intégralement partie de votre réussite scolaire? Les recherches démontrent que si votre corps est en moins bonne santé physique en raison d’inactivité physique ou d’une alimentation malsaine, vous avez moins tendance à bien réussir à l’école1-3. Pourquoi? Une partie de la réponse a à voir avec les interrelations entre le cerveau et le corps – si vous ne traitez pas bien votre corps, vous ne traitez pas bien votre cerveau non plus. Heureusement, si on renverse ces scénarios en devenant plus actifs et en adoptant des modes de vie plus sains, nous avons plus tendance à bien réussir à l’école. C’est une situation gagnante-gagnante!
Même si l’apprentissage sollicite toutes les parties du cerveau, une partie s’avère particulièrement importante pour concentrer en classe et accomplir des tâches d’apprentissage - le cortex préfrontal4. Cette structure réside juste derrière le front et est associée à beaucoup de processus cognitifs importants. Les recherches en neuroscience révèlent que lorsque vous vous concentrez sur une tâche particulière, comme résoudre un problème mathématique ou écrire une dissertation, cette partie de votre cerveau est très active (comparativement à quand vous êtes assis tranquille)5. De la même façon, après une période d’activité physique, comme courir, faire du sport, nager, faire du vélo et bien d’autres activités, la même région préfrontale du cerveau devient très active.
Les chercheurs croient qu’une raison pour laquelle le cortex préfrontal réagit de la même façon à l’activité physique et aux tâches qui exigent de la concentration s’explique par notre passé évolutionnaire en tant que chasseurs-cueilleurs. Nos ancêtres devaient déployer d'énormes efforts physiques lorsqu’ils chassaient ou cueillaient, ce qui entraînait la production d’hormones comme l’adrénaline et la norépinéphrine et les rendait, par conséquent, plus concentrés et vigilants6. Dans la société d’aujourd’hui, une attention prolongée et soutenue s’avère essentielle à la réussite de nombreuses tâches sédentaires, comme l’apprentissage en classe. Ceci est hautement problématique, puisqu’il est clair qu’un facteur majeur qui favorise une attention soutenue, c’est la participation à l’activité physique.
Des chercheurs au laboratoire WEBB (Working on Enhancing Brain and Body Research) de l’Université Western examinent comment intégrer l’activité physique en classe pour favoriser une plus grande concentration pendant les cours et pour améliorer l’apprentissage (webbresearch.ca). Nous examinons en quoi l’intégration de courtes périodes d’activité physique pendant les cours de mathématiques et de lecture (3e année à 8e année) influence l’aptitude des élèves à se concentrer sur la matière scolaire et leur rendement en mathématiques et en lecture. L’intégration de courtes périodes d’activité physique en classe pourrait non seulement améliorer la concentration pendant l’apprentissage, mais aussi encourager une plus grande participation à l’activité physique pendant la journée, favorisant ainsi une santé physique holistique7.
Ces recherches peuvent avoir des réactions en chaîne plus tard dans la vie puisque les saines habitudes sont souvent acquises dans l’enfance et maintenues à l’âge adulte. De fait, les adultes âgés qui ont été physiquement actifs tout au long de leur vie tendent nettement moins à souffrir de démence ou d’autres maladies neurodégénératives8. En intégrant l’activité physique à la classe, nous faisons un pas de plus pour garder notre corps et notre cerveau en bonne santé et nous encourageons non seulement la réussite des élèves, mais aussi leur bien-être général tout au long de la vie.
Barbara Fenesi, Ph. D.
Professeure adjointe, Psychologie appliquée
Faculté de l’éducation
Brain Mind Institute
Laboratoire WEBB (webbresearch.ca)
Courriel : bfenesi@uwo.ca
Références
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